Zette Cazalas


Je sais faire des expositions. Savoir-faire. Je navigue dans un monde d’objets, d’idées, de personnes qui parlent, inventent, écrivent, au-delà des apparences, des mots, des signes, font des signes. Je les suis comme on suit une fanfare ou un parfum qu’on aime, le sens du courant. Je ne remonte pas le sens du courant. Je m’y faufile comme l’épicurienne que je suis. Aujourd’hui MuCEM, demain musée de l’Homme (...et de la Femme pour faire entendre ce que disent Popy Moreni ou Orlan). Le féminin me préoccupe, me revendique féministe. Dans ce métier, quelles sont les qualités à développer ? On met du temps à se régler comme un instrument, un orchestre entier aussi, car l’échelle est mobile. L’art de passer du visible à l’invisible, l’invisible des histoires racontées autour des objets qui monte au réel. Ou est-ce le tissage crée par ce récit d’envoûtement qui solidifie pensée et objet, objet de la nuit de temps, objet de création ? Le désir d’éternité de l’homme_femme_ s’amoncelle, s’accumule, s’entrelace dans les galeries muséales.
z.c

I can do exhibitions. Savoir-faire. I navigate in a world of objects, ideas, people talk­ing, creating, writing, beyond appearances, words, signs, making signs. I follow them as you follow a fanfare or a perfume you like, the flow direction. I don’t go against the flow direction. I snake in and out as an epicurean that I am. Today MuCEM, tomor­row Museum of Man (…and Woman to get you to listen to what Popy Moreni or Orlan say). The female concerns me, I call myself a feminist. In this profession, what are the qualities to develop? It takes time to harmonize oneself as an instrument, an entire orchestra as well, because the scale is mo­bile. The art of moving from visible to invisible, the invisible of stories told around objects that rises to the real. Or is this weaving created by the bewitched tale that solidifies thoughts and object, dephts of times object or created object? The desire for eternity of the wo_man_ piles up, accumulates, intertwines in museum galleries.
z .c

Portrait de Zette Cazalas par la photographe Iris Brosch, septembre 2015
photographe Iris Brosch copyrights Iris Brosch /adagp

Zette Cazalas, architecte-muséographe, est fondatrice et dirige Zen+dCoOffice design, studio de création, principalement appliqué à la muséographie et à la scénographie depuis1995. Formée à l’école d’architecture de Toulouse (1975-77) puis à UP1(78-81), aujourd’hui Paris Malaquais, elle reçoit l’enseignement de Jean Perrotet, membre fondateur de l’AUA avec Paul Chemetov, et Valentin Fabre dans un séminaire « architecture et scénographie ». Elle s’initie à la discipline de la scénographie par l’étude de théâtres contemporains, construits ou restaurés par ses professeurs que sont le théâtre de Bobigny, le Théâtre de la Ville, celui de Chaillot, d’Ivry, et bien d’autres.
Leurs entrailles et leurs machineries, salles, scènes, cintres, dessous, cours et jardins, intérieurs et extérieurs s’entremêlent à donner le vertige. De tout cela va naître l’idée d’une architecture « intérieure », fluidifiée, devenant un milieu ; l’idée d’une orientation dans l’espace et le temps ; l’idée de peau comme une retenue, l’idée d’un moment crée pour une rencontre créée. Idée pour sensation, pour brûlure, pour « essence des choses sensibles » Platon.
De cette rencontre avec le théâtre, prisme de l’émotion, du corps, du plaisir et du jeu, l’architecture s’ancre, de manière tactile, humaine et secrète dans sa vie . Durant ses études, Jean-Jacques Aillagon, alors responsable du service exposition de l’école nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris lui confie l’aménagement d’une exposition d’histoire de l’architecture Pompéi, les travaux des architectes français à Rome (1980). Fenêtre ouverte sur une décennie d’expositions temporaires au Centre des Monuments Nationaux, à la Cité des Sciences et de l’Industrie, à l’école des Beaux-Arts (1982-1992). Des prémices de ces premières expositions thématiques, l’activité muséographique de Zette Cazalas glisse vers la notion de « centre d’interprétation culturel », inventée par les instituts et musées nord américains, qui fait florès depuis, au début à la Cité des Sciences et aujourd’hui dans la reconversion des musées thématiques en musées d’idées. Là où collection vient en concordance, en conciliation avec des supports ou expôts aussi divers que films, archives, manips, la muséographe est partie prenante dans l’adéquation fond-forme. Versant dans lequel ZC va cultiver son art, architecture-information, avec ses outils d’architecte. Les lieux d’exposition s’inventent alors en plateforme transmédia et paysages muséographiques, en installations, et la notion d’ « espace total » devient son échelle de prédilection. La surface d’exposition comme véhicule, comme machine à communiquer. Si le projet d’une exposition consiste à montrer, dimensionner, proportionner, moduler pour régler, dérégler ou réguler les échanges entre visiteurs et objets, visiteurs et idées, objets/expôts et idées, alors il convient d’accepter d’une exposition qu’elle soit un milieu, un corps, un bâtiment à inventer, un écoulement de flux, émotionnels, temporels, cognitifs. Objets de médiation, typologie de supports, conservation préventive des oeuvres, ergonomie de visite, sens du parcours, soclage morphologique, mise à distance, profondeur de champs, etc …, ces mots forment un glossaire qui s’accroît et se perfectionne en même temps que le métier, celui de muséographe s’impose. Zette Cazalas est une des figures de ce mouvement.
En 1993, elle remporte son premier concours international avec le projet muséographique du Musée Basque et d'histoire de Bayonne (livré en 2001). Son activité se développe dès lors dans la commande publique. Avec Jesus Pacheco, architecte dplg qui a rejoint l’atelier en 1998, ils réalisent notamment la muséographie du Musée Masséna à Nice (livraison 2006), celle du Musée national de la porcelaine Adrien Dubouché à Limoges (livraison 2012), le parcours muséographique du MuCEM_Fort Saint Jean, Marseille (livraison 2013), l’exposition de synthèse et référence « Espèces, la maille du vivant » au Musée des Confluences à Lyon (décembre 2014) et le musée de l'Homme à Paris (octobre 2015).


Zette Cazalas architect-museographer Founding director of Zen+dCo, creative studio specialized in museum and set design, communication, and architecture-communication, First trained at the École d’architecture de Toulouse (1975-77), then at UP1 (78-81), now Paris Val de Seine. There, Jean Perrotet, founding member of AUA with Paul Chemetov and Valentine Fabre, teaches her into a newly created seminar entitled “architecture and scenography.”– She learns more about this discipline through the in situ study of contemporary theatres – built or restored by Fabre-Perro­tet in Bobigny – including the Théâtre de la Ville in Chaillot, in Ivry, and also many other traditional theatres and opera houses. All their depths, their machinery – rooms, scene, hangers, stage left/right, technical – their interiors, their exteriors are mixing up to create a feeling of dizziness.Of that will arouse the idea of an “interior” architecture, more fluid, and consequently becoming an environment; the idea of a direction in space and time; the idea of the skin acting as a restraint; the idea of creating a moment to create an encounter; the idea of a burning sensation to grab “the es sence of perceptible things.” Plato. Of that encounter with theatre – prism of emotion, body, fun, and games – architecture would slowly anchor itself in a tactile, secret, and human way in her life. During her studies, Jean Jacques Aillagon, then Head of the exhibition department at the École Nationale Supérieure des Beaux-Arts in Paris, entrusts her with the task of designing an exhibition of architectural history: Pompéi, les travaux des architectes français à Rome (Pompeii, the work of French architects in Rome) (1980). This led her to undertake a decade of temporary exhibitions at the Centre des Monuments Nationaux, at the Cité des Sciences et de l’Industrie, and at the École des Beaux-Arts (1982-1992). From the premises of those early thematic exhibitions, the museum activity of Zette Cazalas moves towards the idea of a “cultural interpretation centre,” a notion invented by North American institutes and museums. This concept has been flourishing ever since, from the very beginnings at the Cité des Sciences to the contemporary reconversion of thematic museums in “museum of ideas.” Where the collection coincides and reconciles with the various exhibition mediums as diverse as films, archives or manipulations, the museographer is essential to the content/form adequacy; an aspect that allows ZC to cultivate her art with her tools as an architect. Exhibition spaces are created as trans-media platforms and, like contemporary artists, notions of museum landscape, installation, and total environment will be developed. The display area is a vehicle, a communication tool. If the exhibition consists in showing, sizing, defining proportions, and modulating to adjust and regulate the exchange between visitors and objects, visitors and ideas, objects/exhibit and ideas, then it should be accepted for an exhibition to be an environment, a body, a building to be created, a flow of emotional, temporal, or cognitive flux.Objects of mediation, types of media, preventive conservation of artworks, ergonomics, visitor journey, identification of messages, architecture of communication, curioseada, identification labels, mediation means, morphological mounting, museum installation, museum landscape, setting distance, depth of field... These words form a prosaic glossary, which gets richer concurrently with learning and knowledge. Soon, an enjoyable profession («working is not a chore, working is breathing») * is in the process of being created: the «architect-museographer.»
* Le Corbusier


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